Pourquoi j'ai écrit ce livre
L'héritage de Tibhirine est bouleversant. Depuis quinze ans, les échos du drame vécu dans l'Atlas, mais aussi le message d'espoir, de tolérance et de foi ne cessent de se répercuter de par le monde. Durant l'année écoulée, plusieurs livres ont témoigné de cette espérance - dont celui que j'ai écrit avec Jean-Marie Lassausse, Le Jardinier de Tibhirine paru en septembre 2010. Et puis, il y a eu le formidable retentissement du film de Xavier Beauvois "Des Hommes et des dieux".
Les articles, travaux et livres que j'ai pu mener pour mieux comprendre et connaître Tibhirine m'ont fait rencontré Dom Thomas Georgeon, aujourd'hui père abbé du monastère de Frattocchie (Italie). Il a été volontaire pour faire revivre le monastère de Tibhirine. Si le projet n'a pu aboutir, Dom Thomas est resté profondément marqué par les moines de l'Atlas et notamment Frère Luc, le médecin, incarné à l'écran par Michael Lonsdale. Avec l'accord de la famille du moine assassiné avec ses frères le 21 mai 1996, à partir de ses documents personnels, de nombreux témoignages inédits, nous avons voulu raconter la vie étonnante, discrète, évangélique de Frère Luc.
Christophe Henning
En résumé
Frère Luc a vécu plus de 50 ans en Algérie et à Tibhirine. Il venait du monastère d’Aiguebelle (Drôme). Cette biographie retrace sa vie exceptionnelle : c'est l'itinéraire d'un homme intérieur, profond, engagé... Plongé dans la résistance pendant la seconde guerre mondiale, puis la guerre d’Algérie durant laquelle il est enlevé par des maquisards parce qu’il est médecin, il vivra sa vocation monastique et sa passion pour l’Algérie et les musulmans au monastère de Tibhirine jusqu’à son enlèvement et sa mort, après 56 jours de séquestration. Ses écrits témoignent d’une forte spiritualité et d’un engagement total auprès des plus pauvres et des malades.
Extrait
"Frère Luc semble avoir eu une conscience vive face à la valeur des actes qui ont fait la trame de son histoire personnelle humaine et spirituelle. Dans le secret de ses méditations qui transparaissent dans ses écrits, il exerçait avec une acuité certaine et sans complaisance une relecture exigeante de sa vie. Il n’y a pas de très longes développement théologiques de frère Luc. Des « perles spirituelles », des éclats du cœur qui ponctuent ses lettres. Il avait pour habitude d’écrire sur une demi-feuille, recto-verso, selon un style bien établi : quelques lignes en réponse à une précédente correspondance, quelques impressions sur l’air du temps – qu’il s’agisse de la politique algérienne ou de l’arrivée du printemps -, une demande pour des médicaments ou des vêtements, et enfin quelques réflexions ou une courte méditation sur la mort, une fête liturgique… Le style n’était pas ponctué d’humour ou d’histoires du monastère : frère Luc s’adressait de manière succincte, presque directe, et reprenait les mêmes idées dans les diverses correspondances. Il n’y avait pas la même urgence quand il s’exprimait dans un texte un peu plus long, ou à la marge d’un bréviaire, d’une bible, sur une image pieuse, une photo ou un papier volant…"
Frère Luc, la biographie, Dom Thomas Georgeon, Christophe Henning, préface de Michael Lonsdale, postface de Mgr Henri Teissier, Bayard, mai 2011, 220 p., 19 €.