Je vous écris d’une aventure initiatique : elle entaillera l’opacité des siècles, brodera son chiffre sur la trame de nos existences. Elle suscitera un souffle susceptible de nous emporter là où nous ne pensions jamais nous rendre.
Je vous écris à la faveur d’un creux foré par l’exigence drastique du confinement. Réincarné, le fantôme de la peste se dérobe à la prise. D’où vient ce virus, quel est-il, quand daignera-t-il nous abandonner avant de muter? Comment lui résister ? Experts et politiques s’affolent et volent en tous sens. L’être simple en est déboussolé.
Je vous écris d’un dilemme. Nous empêchera-t-on de vivre pour nous retenir de mourir ? Des proches incarcérés dans leur chambre de séniorie, au dur des jours interminables, sans relief ni visite autorisée, se laissent glisser vers la tombe.
Je vous écris brutalement délestée du faix des urgences, des déplacements acrobatiques. S’éveille une frémissante sensation de paix. Devant moi s’étend une plage vierge et je cours au devant du loisir, du plaisir offert sans mélange…En un premier temps.
Colette Nys-Mazure, Lettres des Confins 1.