Pourquoi j’ai écrit ces Nouvelles
Au cours d’une année d’épreuves (santé), il m’a été donné de revenir aux ‘fondamentaux’ : l’enfance, l’amour, la nature, la mort… et Dieu.
J’ai voulu rendre hommage à mes camarades d’école devenus mineurs de fond avec l’histoire de Jo la Botte, 22 ans, qui ne remontera jamais au jour, celle du vieux Louilé qui se souvient, un soir de Noël, de ce que fut sa vie.
J’ai voulu dire la découverte de l’amour pour eux, pour le jeune Claude en vacances en Touraine, et pour Régis Labergie, le notaire, en quête du secret de son père.
Et j’ai voulu chanter le bel amour du moine Epiphane qui, au 17ème siècle, restaure les stalles de son église abbatiale et qui sait qu’il ne terminera pas son œuvre, et celui de Joseph le Fol, « l’homme qui parlait aux tournesols », sorte d’Innocent sublime qui se croyait criminel.
Et puis il y a Noël et l’irruption du feu d’En-Haut qui vient embraser les scories de la terre… Pour les humbles et les petits de ces « marges » et de ces « périphéries », fera-t-il Noël aussi ?
En guise de résumé, une réaction de lectrice
"J’ai lu ces cinq nouvelles et novellas qui m’ont permis d’embarquer dans un univers où l’imaginaire et la poésie tutoient les faits divers et la vie réelle et, où un zeste d’autobiographie se fond dans la fiction. Comme fil conducteur, ce qui fait une vie : l’amour, la mort. Mais une conviction apparaît : « les grandes eaux de la mort ne peuvent éteindre l’amour ».
L’auteur se fait le chantre de la Lorraine, avec ses coutumes, ses vicissitudes et son histoire tourmentée. C’est un hymne aux gens de la mine et aux humbles de la terre. Face à la cruauté de la vie et au mal, les personnages, simples, tendres, touchants et pleins de bienveillance, m’ont émue aux larmes. En filigrane, les paroles du Livre : « Heureux les doux, les cœurs purs, les humbles … ».
Un ouvrage certes comparable à une mélodie populaire, comme l’indique la partition en première page, mais, bien plus encore, un oratorio de noël dont la beauté unit le divin à la simplicité. Un bonheur de lecture qui donne envie de chanter, car « le bonheur n’est pas l’absence de souffrance, il est un feu du cœur qui embrase même les scories ».
Un extrait
Dehors, l’orage sévissait.
Il avait attendu jusqu’au soir pour éclater.
Tout un jour, depuis l’aube, il avait rôdé au-dessus du bourg. Ses lourdes masses avaient tour à tour occupé chaque recoin de l’horizon, bouchant les issues, supprimant tout espoir. Peu à peu, on s’était senti cerné de toutes parts. Depuis l’aurore jusqu’au crépuscule, le roulement de tambour avait crû, implacable, accru soudain par le crépitement des grêlons sur les champs, les chemins et les toits. Alors s’étaient déchaînées les flagellations du vent, stridentes, ponctuées par les canonnades du tonnerre qui déchirait l’espace.
Et la terre avait été livrée aux ravages des eaux.
Les blés encore debout s’aplatirent et les maïs se couchèrent. Les pommiers déjà lourds se tordaient, élevant d’incompréhensible manière des branches chargées de fruits qui retombaient ensuite, cassées net, claquant tels des coups de feu dans la nuit.
Pliaient alors et ployaient les peupliers solitaires, en proie aux fulgurances d’en haut.
ROGER BICHELBERGER, Noël était venu sans rien dire à personne, Albin Michel